samedi 11 février 2017

Can 2017 : Six points clés du triomphe camerounais…



“Le football est un jeu simple ; 22 hommes courent après un ballon pendant 90 minutes et, à la fin, ce sont les allemands qui gagnent.”
La citation historique de Gary Lineker est également valable pour le Cameroun que nombreux surnomment comme l’Allemagne de l'Afrique, pour son jeu physique et l'esprit de lutte pour la victoire. La seule différence entre les deux équipes est que le Cameroun n'a pas la même vocation offensive qui caractérise la machine teutonne. Le Cameroun a ajouté une cinquième étoile sur son fanion et ce en jouant presque à la maison, vu que le Gabon est son voisin le plus proche culturellement  aussi bien qu’économiquement (les camerounais forment la communauté étrangère la plus importante du Gabon), on peut déduire par ricochet qu'il va aussi remporter la Can 2019 à domicile.


Mais ce qui s’est passé dimanche dernier était tout un match digne de finale où les deux remplaçants et  cadres de la sélection camerounaise, Nicolas Nkoulou et Vincent Aboubakar, étaient les héros de la fin du film avec un but chacun. Ces deux garçons semblaient donner une logique à l'une des meilleures éditions de la Coupe d’Afrique de l'histoire.

L’Égypte pleure encore après avoir perdu le titre qu’ils ont presque senti dans leurs mains--non sans raison-- parce qu'ils ont joué leur meilleur match du tournoi sous la direction de la star Mohamed Salah, qui a encore fait montre de prouesses techniques. Les protégés de l'entraîneur argentin, Hector Cuper, ont ouvert le score grâce à un joli but de Mohamed El Nelny (22 '), suite à une passe millimétrée de l’incontournable Salah.

Ce qui semblait être écrit dans le destin est venu quand le défenseur Adolphe Teikeu, fautif sur le but concédé, s’est blessé avant la mi-temps. Hugo Broos l’a remplacé par l'expérimenté Nicolas Nkoulou. C’est ce dernier qui va égaliser à la 59e minute par un coup de tête de pure puissance. Un autre remplaçant, rentré plus tard, c’est Aboubakar qui a scellé la victoire à la 87e minute en contrôlant le ballon de la poitrine, en pleine course, enchaîne un sombrero sur le dernier défenseur avant de marquer d’un tir croisé.


Pourquoi le Cameroun a pu gagner? Voici six points clés:



Le sens du coaching gagnant du DT Hugo Broos

Hugo Broos après la remise des trophées.

Le résumé que j'ai exposé précédemment explique tout, mais un peu plus de détail ne nuira pas. On a toujours tendance à oublier le travail ingrat de l'entraîneur lors de la victoire, parce que ce n’est pas lui qui joue sur le terrain du jeu. Il n’est pas Leo Messi qui peut marquer un but quand il veut. Mais nous devons savoir que gagner un match, n’importe qui est capable de le faire.

Cependant, remporter un tournoi de 6 matchs de haut niveau, dans un calendrier serré, demande un peu plus que simplement le talent des joueurs et de la chance. On a vu comment la super sélection argentine de Bielsa s’était effondré au premier tour du Mondial 2002. La France aussi, dans sa meilleure génération de l’histoire, n'avait pas franchi la phase de groupes de ce tournoi au détriment du Sénégal et du Danemark.

Souvent, la clé du succès est plutôt une question de savoir doser les talents, la motivation, le timing et la chance. Les grands coachs sont ceux qui savent gérer ces quatre facteurs. Il faut rendre le mérite à Broos qui a su remplir son objectif contre toute attente et, en plus, en concevant un schéma de jeu séduisant. Ce n’est pas facile de réussir ce genre d’exploit dans un pays comme le Cameroun qui dispose de 11 millions d'entraîneurs quand l'équipe nationale joue, y compris la première dame du pays qui est aussi sélectionneur des Lions.


Unité




La sélection du Cameroun a été fortement critiquée au pays lors des éliminatoires et pendant les préparatifs de la Coupe d'Afrique. Au lieu de perturber le groupe, ces critiques ont plutôt servi de stimulant pour les joueurs afin de chercher à se réconcilier avec l’exigeant public camerounais. Un groupe uni, solide et motivé à commencé à se forger, match après match, pendant la Can 2017. Chaque joueur qui est entré dans le jeu a vraiment mouillé le maillot. Le geste du capitaine Moukandjo invitant son prédécesseur Nkoulou, pour soulever ensemble la coupe, lors de la cérémonie de la remise du trophée, témoigne de l’ambiance de solidarité qui règne dans ce groupe.


Celui qui ne fait pas perd ...


Si vous ne pouvez pas attaquer, vous êtes donc à la merci des attaques de votre adversaire.
Le Cameroun n'avait pas une super-équipe en tant que tel, mais le manque de joueurs percutants et créatifs dans ce tournoi a fait en sorte que les adversaires du Cameroun ne parviennent pas à briser son jeu physique et sa défense de fer. Le Sénégal était la meilleure équipe de la phase du groupe, mais leur jeu se repose plus  sur l’engagement physique que le football. Quand le Sénégal a croisé le Cameroun en quart de finale, il a perdu ses repères techniques, parce que dans ce genre de match très physique c’est le Cameroun qui domine en Afrique.

L'Egypte est une équipe formée de fins techniciens avec le ballon, mais elle manque de vitesse et de percussion pour acculer une équipe jeune et athlétique comme celle du Cameroun. La seule équipe qui aurait pu le faire est le Burkina Faso, lors de la phase des groupes, car c’était l'équipe la plus complète du tournoi. Mais lors de leur confrontation, les Burkinabés avaient trop respecté le Cameroun et se sont réjouit d’un partage de points (1-1).

Le mur de Berlin

 
Adolphe Teikeu, la tour de contrôle de la défense camerounaise.

Le quatuor défensif formé par Fai, Ngadeu, Teikeu, Oyongo et le gardien Fabrice Ondoa était l'un des meilleurs du football africain de tous les temps. Je ne l’affirme pas seulement en termes de buts encaissés (3), mais plutôt par la qualité du jeu montré par les défenseurs, leurs qualités athlétiques et leurs capacités à se projeter rapidement devant pour appuyer l'attaque.

Contrairement aux équipes ultra défensives de l’Europe de l'Est qui se barricadent derrière, comme la Serbie et d'autres, le Cameroun joue toujours sur les deux moitiés du terrain.


Plus "d’endurance"


Jusqu'à présent, on n a jamais su si c'était pour cause de blessure ou un autre contretemps, mais plusieurs observateurs des Lions ont dû se gratter la tête pour comprendre ce qui a poussé le DT de laisser au banc des joueurs du calibre de Nkoulou, Aboubacar ou Njie, surtout pour ce dernier qui était pourtant titulaire lors des deux premiers matchs.

Cependant, des joueurs moins talentueux, mais plus forts et athlétiques, comme l’avant-centre Ndip Tambe et le milieu de terrain Arnaud Djoum furent les heureux élus pour faire respecter les plans du coach. En effet, la force et l’endurance de ces deux joueurs furent déterminantes pour permettre au Cameroun de garder un rythme de jeu intense et épuisant sous la chaleur humide de l'Afrique  centrale.

Le défenseur Ngadeu, appréciez la contexture physique du footballeur camerounais. 
Après les 65 minutes de jeu, les adversaires du Cameroun étaient épuisés et incapables de reprendre l'initiative du jeu, ce fut surtout le cas du Ghana en demi-finale. Pour ce genre de tournois courts, de haut niveau, le facteur physique était la clé de la victoire.

Le Cameroun a mieux géré son effectif et ses forces. Un exemple clair c’était lors de la course en profondeur, lorsque le supersonique Bassogog a battu la défense ghanéenne dans un sprint de 60 mètres pour marquer le second but dans le temps additionnel.


Benjamin Moukandjo, la bête ...

 
Moukandjo marque sur un coup-franc enroulé contre le Burkina Faso.

Il est difficile de comprendre le choix de la CAF en désignant Bassogog comme le meilleur joueur de la Can 2017, quand on sait que l'âme de l’équipe et les actions dangereuses passaient par les pieds de Moukandjo. Le longiligne milieu offensif a été le parfait meneur de jeu des Lions Indomptables et aussi le leader qui a montré l’exemple d’engagement et de technicité pour atteindre l’objectif final.

La sélection camerounaise est encore jeune et le ciel est le sommet de son potentiel. Si ce groupe se maintient ensemble avec le même état d’esprit, ils vont accumuler d’autres titres majeurs. Quant à Hugo Broos, il n’avait même pas fini de célébrer son titre quand plusieurs journalistes camerounais lui ont demandé si la liste était fermée pour les 8 joueurs titulaires qui avaient refusé de jouer la Coupe. Mais ceci est un autre débat, pour l'instant laissons l'homme savourer sa victoire ...