Lors d’un précèdent article, nous avons reporté la fuite de
six congolaises à la veille du match des ¼ finales contre la Serbie. Après plus
de précisions, nous voulons rectifier qu’il n’y avait eu que trois désertions,
en l’occurrence : Jo-Verany Moukassa, Marjolaine Nkouka et Patricia
Okoua-Ngoua.
La meneur de jeu Raïssa Yalibi et l’ailière Mireille
Tchikaya n’avaient pas fui, mais n’ont plus continué la compétition pour cause
de blessures graves.
Maintenant que nous avons un peu plus d’information sur les
circonstances de la fuite des joueuses lors du dernier mondial junior d’Ostarava,
nous allons y revenir pour apporter nos recommandations aux dirigeants de la
FECOHAND.
La puissante Yalibi n'a pas déserté |
Selon une entrevue accordée à James Golden-Éloué, des Dépêches
de Brazzaville, Henri-Joseph Parra(président de la FECOHAND) est revenu sur le
fil des évènements. « Je ne peux pas
vous dire ce qui s'est passé dans la tête de ces enfants. Il faudra les
interroger un jour. Mais je peux vous dire que la décision de leur fuite vient
de loin. Je crois qu'elles ne l'ont pas décidé sur place à Ostrava. Je pense
qu'elles ont quitté Brazzaville avec des idées arrêtées. Il semblerait qu'elles
se soient préparées, notamment en prenant de l'argent, depuis Brazzaville. »
A dit Mr. Parra à propos de la motivation des filles.
Bellette Suzanne Mambou après une blessure |
La fuite, digne d’un
film à la James Bond.
« Vous savez dans
un groupe ou tout se passe bien », poursuit Henri Joseph Parra, « les
responsables de l'hôtel ne font plus attention. Ils donnent les clés des
chambres sans trop vérifier. C'est leur responsabilité. Elles ont pu avoir acheté
une puce locale et prendre les contacts nécessaires et emprunter une voiture
aux environs de l'hôtel. Le soir pendant que tout le monde était au restaurant,
on a laissé les enfants un peu libres puisqu'on passait au second tour.
Après
leur petit shopping le matin, elles ont profité de ce moment pour partir. Nous
étions au cinquième étage de cet hôtel, elles ont balancé leurs affaires par la
fenêtre du couloir dans une partie un peu moins éclairée et sont descendues
comme si de rien n'était. »
À propos de la
destination finale des fugueuses
« C'est la désolation
parce que si on avait joué les huitièmes de finale avec ces trois joueuses qui
nous ont lâchés, je pense qu'on était en mesure de gagner ce match qui nous
permettait d'être huitièmes au lieu de seizièmes. Nous avons la certitude
qu'elles sont en France puisque leur visa courrait jusqu'au 18 juillet. »
Quelle mesure à
prendre pour que ce genre de mésaventures ne se produise plus ?
Il est difficile de
prendre des mesures particulières, parce qu'elles sont toujours contournées.
Nous avons décidé de fouiller les sacs et de supprimer les téléphones. Mais une
fille a pu trouver un téléphone, je ne sais comment. Certainement, nous aurions
dû mieux sécuriser les passeports. On aurait pu les laisser à la réception de
l'hôtel ou les garder dans un coffre-fort. Je crois que par le passé, nous
avons connu les mêmes situations. Les filles n'avaient pas accès aux passeports
détenus par les membres de la fédération. Mais elles avaient au départ de
Brazzaville fait faire d'autres passeports. C'est peut-être un problème de
fond, parce que ces joueuses traînent aujourd'hui dans la rue. Elles ne peuvent
pas avoir de contrats, l'IHF les a repérées à la fois par les photos et leurs
styles de jeu sur le terrain. Je pense que l'IHF va prendre une grande
décision.
Donc c’est un Henri Joseph Parra pris de désolation, qui s’est
exprimé à propos de cette affaire. Et ça peut se comprendre, surtout que la
FECOHAND avait misé sur cette équipe dans sa stratégie à récupérer le trône
africain perdu au dépens de « l’invincible »Angola.
Dans cette
équipe, Jo-Verany Moukassa et Marjolaine Nkouka étaient considérées, avec
Mireille Tchikaya, Raïssa Yalibi et Suzanne Mambou, comme les valeurs sûres du
handball congolais.
Jo Moukassa était la star montante du handball congolais |
Ce cas de fuite rappelle un autre qui s’était produit en
2008, mais avec deux filles de la sélection nationale de football-dames, Laure
Kolelas et Saya Ndoulou. Ces deux filles étaient les meilleures joueuses des
Diables-Rouges dames et elles ont profité d’un stage de deux semaines à Rostock(Allemagne)
pour fuir.
Elles auraient été aidées par un journaliste, membre de la délégation, pour disparaitre malgré les fortes mesures de sécurité. Aux dires de ceux qui avaient effectué le voyage, il a fallu un véritable combat pour réussir à ramener à Brazzaville toutes les filles moins les deux fuyardes.
Elles auraient été aidées par un journaliste, membre de la délégation, pour disparaitre malgré les fortes mesures de sécurité. Aux dires de ceux qui avaient effectué le voyage, il a fallu un véritable combat pour réussir à ramener à Brazzaville toutes les filles moins les deux fuyardes.
La fuyarde Chardente Saya Ndoulou est devenue l'une des stars de la D2 française. |
Après
les entraînements, on les enfermait toutes dans une seule chambre, avec leurs
passeports confisqués. Cependant, ça n’a pas empêché de perdre la meilleure
joueuse, Saya Ndoulou, ce qui a coûté cher à l’équipe à la CAN 2008 EN Guinée Équatoriale(Le
Congo avait occupé la dernière place du groupe).
Aujourd’hui, les deux filles jouent en division 2 française.
Chardente Saya Ndoulou, est la star de son club le FC Compiègne. Laure Kolélas joue à Evreux.
La morale de l'histoire est que ces deux filles avaient finalement raison, parce que leurs collègues de l'équipe nationale qui sont retournées au Congo n'ont plus joué un seul match international depuis 4 ans ! Alors qui a raison, les fuyardes ou le ministère des sports?
La morale de l'histoire est que ces deux filles avaient finalement raison, parce que leurs collègues de l'équipe nationale qui sont retournées au Congo n'ont plus joué un seul match international depuis 4 ans ! Alors qui a raison, les fuyardes ou le ministère des sports?
Nous sommes d’accord avec monsieur Parra, qu’il n’y a pas de
mesures particulières à prendre dans de telles situations. Une personne qui est
déterminée à déserter lors d’un tournoi est insaisissable, surtout dans le cas
d’une dame. Elle pourrait solliciter l’asile politique (et obtenir gain de
cause), dans le pire des cas, pour avoir été supposément victime de viols et brimades au pays.
Il faut tout simplement obtenir du gouvernement plus de
crédit et de financement de programmes pour améliorer la situation
socio-économique des athlètes. Il faut d’abord commencer avec un projet pilote
pour les athlètes féminins, qui sont les plus touchés par la précarité. Il n’est
pas normal qu’une joueuse internationale de handball puisse dépendre
financièrement de ses entraineurs ou des
petits copains. L’autonomie financière est le cadeau que tout le monde
recherche dans la vie.
L’État congolais devrait subventionner le sport féminin, le
parent pauvre du sport en Afrique. Le ministère des sports pourrait créer un
programme mutuel avec les ministères de l’intégration de la femme et celui de l’éducation
pour supporter un tel programme de subvention.
Il s’agirait dans un premier de temps de créer un programme
de bourse olympique, comme celui que l’on voit au Canada. Une athlète qui
devient internationale (toute catégorie confondue) ou membre d’un club participant
aux compétitions africaines, devrait se voir une accorder une bourse à hauteur
de 100 000 francs CFA par mois. Celles qui sont encore aux études recevraient des suppléments
et des bonus pour les frais scolaires et autres.
Toujours dans le cadre de ce même programme, les athlètes dames
titulaires d’un diplôme ou d’une qualification devraient être dans une liste
prioritaire d’embauche dans la fonction publique ou dans des organismes parapubliques.
C’est une manière d’encourager les athlètes à performer dans leurs disciplines
sportives tout en leur libérant des préoccupations extra-sportives comme la
recherche du travail, le gain facile et la dépendance financière.
C’est un programme tout à fait réalisable avec les moyens de
la république. Encore là il ne s’agit pas de toutes les athlètes, mais
uniquement celles qui répondent à la catégorie
de haut rendement (sélections nationales, club champion du Congo etc.).
Les programmes, les salaires des joueuses ne sont pas
suffisants face à des jeunes convaincues et déterminées à aller vivre en France.
La majorité de ces athlètes sont même prêts à renoncer à leur carrière pour
aller trainer dans la rue en France.
Donc confisquer les passeports des joueurs n’est pas la meilleure solution.
Il faut respecter les athlètes.
Dès fois il est mieux de savoir lorsqu’on a perdu sa partie de
poker, et décider alors à quel moment sortir son As pour jouer sa
dernière carte. On arrive dans une coupe du monde, le chef de la délégation réunie
tout le monde entre les quatre coins du mur, puis parle sans ombrages. « Tenez, je vous remets vos passeports. Je ne
peux pas imaginer ce que chacun de vous trône dans son esprit. Mais si jamais
quelqu’un prévoit de déserter, de grâce qu’il attende après le tournoi. Nous ne
retiendrons personne, mais nous devons aller au bout du tournoi pour ne pas perturber
l’organisation de la compétition ».
Au moins c’est une précaution nécessaire. Imaginons un peu
le cas de figure à Ostrava, si le Congo s’était vu obligé de perdre ses matchs par forfait,
faute de manque de joueuses?
Le Congo aurait été suspendu pour 5 ans et condamné à payer
de sévères pénalités financières à cause d’histoire de vols de passeport dans
le sac d’un officiel et de désertions.
C’est un scénario très plausible.