lundi 4 janvier 2016

Congo-Brazzaville : la crise économique arrive à pas géants.


La chute du prix du pétrole à 40-45 dollars le baril pèse énormément sur le Congo, dont l’État tire à plus de 80% de ses recettes sur cette ressource. Cette tendance devrait perdurer avec le retour en force imminent de l’Iran (4e en termes de réserves pétrolières mondiales) sur le marché international. 
Ce retour en force de l’Iran sur le marché va augmenter l’offre mondiale du pétrole. Les prix vont encore sensiblement baisser, car l'Iran voudrait combler son déficit financier au sortir des sanctions qui lui sont infligées par les grandes puissances internationales.


Cette situation désagréable se fait déjà sentir aujourd'hui au Congo où tous les chantiers sont en standby. L’État congolais n’arrive plus à tenir ses engagements et délais de financement auprès de ses partenaires pour les grands travaux. Pour ne pas arranger les choses, la Chine, son principal partenaire économique, est aussi en crise actuellement. La récente crise du carburant qui paralyse Brazzaville et Pointe-Noire depuis deux semaines, vient encore s'ajouter pour enfoncer le clou.

La coopération sino-congolaise connait un frein à cause de la crise économique internationale.
Cette crise du carburant paralyse la vie économique des deux plus grandes villes du pays, avec comme conséquences la flambée des prix des marchandises et des délestages électriques intempestives. Cependant, nulle n’est question de céder à la panique et la fatalité. Le gouvernement congolais peut encore redresser la situation en prenant des mesures fermes et pragmatiques. 

Le Congo ne manque pas de ressources naturelles et humaines pour surmonter cette crise économique. Mais le président Sassou devrait laisser de côté son système politique qui entretien l’incompétence, le clientélisme et le culte de la personnalité dans le quotidien des congolais.

Congo-Brazzaville : la crise économique arrive à pas géants
La plateforme petrolière de Djeno.
Nous devons tous réunir nos ressources et forces pour relancer les secteurs économiques qui sont porteurs d'espoir dans le marché international. Cela devra se faire en appliquant les méthodes rigoureuses de la bonne gouvernance comme le font les dirigeants de l’Éthiopie et du Rwanda.

Voici les secteurs économiques émergents que le Congo peut relancer pour sortir de la dépendance du marché du pétrole :


L’électricité thermique

Congo-Brazzaville : la crise économique arrive à pas géants
Les turbines électriques de Moukoukoulou.

La nouvelle centrale hydroélectrique d’Imboulou inaugurée en 2011 tarde à offrir le rendement prévu sur le réseau de distribution électrique nationale. Les travaux de construction du barrage de Liousso(19,92 MW) connait un ralentissement dû aux financements. D’un autre côté, les recettes des exportations pétrolières ont chuté de 60% de sa valeur nominale. Allons-nous continuer à subir, en même temps,la crise financière et les délestages électriques ?

Non, chers compatriotes, c’est l’un ou l’autre mais pas les deux. La première décision à prendre est d’augmenter le nombre de centrales électriques à gaz et des centrales thermiques dans le pays afin de soutenir l’émergence d’une économie locale dynamique et émergente. 


Cimenterie Dangote
La cimenterie Dangote, en construction dans la Bouenza, est l'un des projets prometteurs pour redynamiser l'économie congolaise.

Sans energie on ne peut rien faire. Sans énergie on ne peut même pas se rendre au travail, ni se aller se faire soigner à l'hôpital. Tout développement comme par là. Malheureusement, nous avons pris la mauvaise habitude d'exploiter nos hydrocarbures pour les exporter et gagner des devises qui vont nous permettre encore d'acheter des biens de cossomation importés. C'est donc le cycle vicieux que nous faisons avec nos hydrocarbures. Pourquoi ne pas les exploiter pour booster d'autres potentialités encore endormies et ainsi diversifier notre économie?

La centrale à gaz de Djeno, à Pointe-Noire.

Pour cela, nous devons réduire nos exportations pétrolières et doubler les capacités de la Coraf pour alimenter le marché national en produits raffinés: gaz butane, supercarburant, carburéacteur, gasoil et fuel. Si la Coraf double sa capacité de traitement du brut rapidement, ça nous donnerait la matière première nécessaire pour construire plusieurs centrales thermiques et gazières en peu de temps. Si dans les deux années à venir, nous pouvions augmenter la production électrique nationale de 20%, grâce aux centrales thermiques, nous aurions fait un pas important vers l’élimination des délestages électriques au Congo.

la récupération des gaz torchés à Pointe-Noire.
Le revers de la médaille de cette stratégie serait l’augmentation du niveau de pollution de nos villes. Mais que devrions-nous faire encore? Continuer de vivre sans électricité dans un environnement naturel "écologique"?

Même sans exploiter des centrales thermiques, l'aire de nos grandes villes est deja très polluée avec des echapements de gaz des vehicules, motos et toute sorte d'engins qui circulent sans respecter les normes environnementales du pays. En plus de notre propre population, il faut ajouter celle des pays industrialisés qui nous penalisent déjà directement avec les changements climatiques des dernières années.
La belle époque de la Comilog au Congo
Nous n’allons pas attendre une « révolution industrielle verte » pour sortir du marasme économique. Nous avons besoin de l’électricité pour soigner nos malades dans les hôpitaux. Nous avons besoin de l’électricité pour éclairer nos écoles et supporter l’éducation nationale. L’électricité nous permet de soutenir nos activités économiques, pas seulement les grandes structures économiques mais aussi les petits opérateurs locaux. 

L’écotourisme

Fleuve Congo


L'écotourisme est l'un des secteurs qui connaît le plus fort taux de développement dans le monde. Le Congo qui est l’un des grands poumons verts de la planète ne devrait pas rester au bord de la rue de cette embellie financière. Nous avons les ressources naturelles et les potentialités respectables pour offrir un bon produit écotouristique sur le marché. Malheureusement, les autorités congolaises ne prennent jamais le temps d’associer les collectivités locales et les opérateurs économiques locaux dans ce genre de projets. 

Alima Palace, Oyo, Congo
Alima Palace à Oyo.

Nous avons l’exemple des projets faramineux et fantaisistes de l’aéroport international d’Ollombo et de l’Hôtel Alima Palace d’Oyo qui sont tombés à l’eau. Pourtant l’idée de ces projets était intéressante et légitime. Cependant, le maître d’œuvre de ces projets n’a pas tenu compte des réalités et des limites du marché avant de les démarrer. Les villes d’Oyo et Ollombo ne sont pas encore prêtes pour abriter de telles méga-infrastructures. 


Corniche de Brazza
La nouvelle corniche de Brazzaville, encore en construction, va repositionner la capitale congolaise comme le premier pôle tourisitque du pays.
Avant de lancer un produit touristique, il faut d’abord créer un label qui se vend. Ce label nous les avons avec nos parcs naturels de gros singes et notre paysage fantastique. Ce qui nous reste à faire est seulement d’améliorer les infrastructures de transports et de l’hébergement qui relient ces parcs naturels aux villes les plus proches. 

Makabana
Il faut réhabiliter le chemin de fer  de la Comilog pour faire renaitre luxuriante ville de Makaba.
On n’avait pas encore besoin d’un grand aéroport international, sinon juste des tous petits aérodromes pouvant accueillir des frets commerciaux, des gares routières bien équipées et des petits ports fluviaux.

On devrait développer au moins plusieurs axes de transport pouvant relier le couple Oyo-Ollombo des parcs d’Odzala et Ndoki en si peu de temps. Un autre axe de transport entre Ouesso- Ndoki; Ouesso-Lac Télé-Epena; Mossaka-Oyo-Ollombo.

Route nationale Brazza-pn
La route Brazzaville-Pointe-Noire est presque en phase terminale au niveau de la Bouenza.
Dans la partie sud du pays, on réhabilite le chemin de fer de l’ancien Comilog pour le connecter aux parcs de Mayombe via la route nationale Pointe-Noire-Brazzaville. Tout au long de ces axes routiers, on construit des auberges, des campings de cabanes en bois, des stations d’essence et d’approvisionnement en divers produits de consommation, des Guest Houses(villas d’accueil), des gites modernes en bambou…Bref, des infrastructures hôtelières qui répondent aux normes de la biodiversité sont celles qui se vendent bien de nos jours.

Ollombo Airport
L'aéroport international d'Ollombo.
En matière d’hébergement, là aussi on n’avait pas besoin d’un hôtel 5 étoiles au milieu de nulle part à Oyo. On pouvait encourager des opérateurs économiques locaux de construire des petits hôtels comme ceux qui inondent Brazzaville ces dernières années. 


La filière du cacao


Après une longue période d’hibernation, le Congo a décidé de relancer sa filière du cacao grâce à un partenariat public-privé. Le déclic est venu de la société forestière malaise Olam qui s’est engagée à commercialiser le produit.

C’est un pas important, certes, mais qui devra être amorcé avec rigueur et sérieux. Il ne suffit pas seulement de se contenter d’un partenariat avec Olam. Il faut diversifier les partenariats et les stratégies pour augmenter la production et la qualité du cacao congolais. Le marché du cacao est l’un des plus stables du commerce mondial. Il y’a définitivement des gains à chercher dans ce secteur.

Le cacao congolais est encore perfectible de qualité.
L’une des premières décisions devraient être d’accorder des subventions aux planteurs congolais actuels et à ceux qui veulent s’y lancer. Pour le début d’un projet pilote, il faut créer des villages agricoles, comme ceux qui ont été construits à Igné, qui se spécialiseront uniquement sur la culture du cacao. Les départements de la Sangha, la Lékoumou, la Likouala et la Cuvette sont ceux qui présentent les meilleurs atouts géographiques pour expérimenter ces nouveaux villages cacaoyers.

Dans chacun de ces villages, on créera des laboratoires pour permettre le clonage des plants améliorés de cacao qui apporteront des meilleurs rendements. Dans le cas de la région de la Sangha dont les vergers sont nombreux, mais devenus trop vieux et mal entretenus, il sera impératif de procéder à la régénération des vergers à travers le greffage des jeunes plants.

Toutes ces mesures sont nécessaires à relancer la production cacaoyère congolaise, en quantité et en qualité, afin de retrouver sa compétitivité dans le marché international. Par ailleurs, les subventions de l’État vont permettre de démarrer les activités et d’accroitre les revenus des producteurs pendant les périodes de non-production.

C’est aussi une manière de rentabiliser les énormes revenus du pétrole qui jusqu’ici n’ont servi qu’à alimenter la bureaucratie, la corruption et la culture de l'assistanat dans la mentalité congolaise.